Berceau de la nation australienne

Par Hugues Derouard

Avec près de 4,5 millions d’habitants, Sydney, berceau de la nation australienne, apparaît, plus de deux siècles après sa création, comme la plus grande métropole du pays.
Grand port et centre financier, la capitale de la Nouvelle-Galles du Sud, au cœur d’une majestueuse baie, est une destination à part, notamment pour son célèbre opéra à l’architecture futuriste.

Retour en 1788. Dix-huit ans après que l’explorateur anglais James Cook a posé un premier pied en Australie, Arthur Philip débarque sur la côte sud-est depuis Portsmouth. L’amiral, au service de la couronne britannique, établit un premier site de peuplement dans une anse en eau profonde – l’actuel Port Jackson. Il baptise l’endroit Sydney Cove, en hommage au ministre de l’Intérieur anglais. Sydney est née !

« C’est l’une des plus belles rades du monde. Un millier de navires pourraient y trouver un ancrage d’une sécurité totale », dit alors Arthur Philip, à la tête d’une flotte de onze navires. Rien d’idyllique, pourtant, au premier abord. La terre est pauvre, l’environnement hostile. Le site est alors destiné… aux bagnards ! Les Anglais ayant perdu des colonies suite à l’indépendance des Etats-Unis ont conquis ce « nouveau monde » pour y fonder une colonie pénitentiaire et désengorger leurs prisons.

Quoi qu’il en soit de ses origines, la colonie fondée par les occidentaux apparaît aujourd’hui comme le berceau de la nation australienne. Guère étonnant dès lors que le 26 janvier, date de l’arrivée des premiers immigrants européens à Sydney, ait été choisi comme fête nationale. Manque de denrées, famine, maladies, sécheresse, instabilité gouvernementale … la colonie, peuplée de bagnards, de soldats et de fonctionnaires, connaît pourtant des premières années difficiles. L’alcool sert même de monnaie d’échange.

« Si Dieu a créé le Harbour, Satan a dessiné la cité », moquait l’écrivain américain Mark Twain, de passage à Sydney.
Pour « booster » la colonie, il faudra attendre l’arrivée de nouveaux colons, la découverte de terres riches et cultivables, au-delà des Blue Mountains, et l’importation du mouton Mérinos.

Dès lors, son développement est fulgurant, d’autant plus que le gouvernement propose gratuitement des terres et que les forçats fournissent une importante main-d’œuvre pour bâtir routes et infrastructures.
Anglais et Irlandais débarquent nombreux en quête d’une nouvelle vie, au détriment des populations autochtones Eora, décimées par les épidémies apportées par les Européens. La croissance démographique est phénoménale : entre 1850 et 1890, Sydney passe de 60 000 à 400 000 habitants.

Son ossature urbaine prend également forme. L’architecte Francis Greenway, sous l’impulsion de l’emblématique gouverneur Lachlan Macquarie, édifie d’imposants bâtiments de style géorgien tels que l’église Saint-James et les Hyde Park Barracks : c’est l’actuel quartier The Rocks, le plus vieux de Sydney, aujourd’hui occupé par des pubs, restaurants et boutiques.

La cathédrale Sainte-Marie et la Governement House, aux allures de château néogothique, voient le jour, avant la première université d’Australie, en 1850.
Grâce à son port, la ville devient une place commerçante importante – notamment dans l’économie lainière.

Une métropole cosmopolite

Plus de deux siècles après sa création, que de chemin parcouru ! La ville, riche de 4,5 millions d’habitants, est la plus grande métropole d’Australie.
C’est pourtant Canberra qui est choisie en 1927 comme capitale de l’île-continent pour trancher dans la rivalité entre Melbourne et Sydney.

Porte d’entrée de l’Australie, la capitale de la Nouvelle-Galles du Sud apparaît en tout cas comme la ville la plus audacieuse et cosmopolite du pays.
Les aborigènes et les descendants des colons côtoient des Italiens, des Grecs et un grand nombre d’asiatiques – un quartier Chinatown existe même. Une mixité qui fait désormais de la ville un endroit réputé, notamment pour ses restaurants proposant des saveurs métissées.

Comme toutes les grandes villes d’Australie, Sydney s’organise autour de la City, quartier des affaires où se mélangent harmonieusement les gratte-ciel et les bâtiments coloniaux plus anciens, entrecoupés de nombreux parcs.
Autour, les faubourgs et les banlieues pavillonnaires s’étirent sur des dizaines de kilomètres.

Centre commercial et financier, Sydney est avant tout un grand port, grâce à sa baie couvrant quelque 55 km2, l’ « âme » de la ville. Ce bras du Pacifique s’engouffre dans la métropole, des falaises des Heads, à son entrée, jusqu’à la Parramatta River, 21 kilomètres à l’ouest.

Ses eaux d’un bleu intense, parsemées d’îlots, sont couvertes de bateaux de plaisance, voiliers, ferrys, cargos et porte-conteneurs qui y exportent laine, blé, viande, et y importent pétrole ou voitures.
A l’est de la ville, s’étire Bondi Beach, l’une des plus célèbres plages australiennes. Les amateurs de surf se mesurent à ses puissants rouleaux, quand les touristes viennent, eux, profiter d’un petit paradis de sable fin en plein cœur de la ville.

Deux emblèmes de l’Australie

Sydney, qui a été mis sous les feux des projecteurs lors des Jeux Olympiques d’été en 2000, est en effet une destination touristique à part entière.
Les visiteurs du monde entier viennent y découvrir des monuments qui comptent parmi les plus emblématiques d’Australie. Le premier d’entre eux, c’est tout d’abord le pont de Sydney (Harbour Bridge), affectueusement appelé le « vieux cintre » par les Sydneysiders (comme on nomme les habitants) en raison de sa forme en arc cintré.
Né de l’imagination du Français Georges Imbault, ce pont à arche métallique unique est un ouvrage technique à l’élégance hors du commun.

Ce passage à six voies –piétons, voitures, bus, cyclistes, trains– est le plus vieux pont de Sydney : il fut élevé en 1932 pour relier le quartier des affaires à la rive nord de la baie. Long de 1149 mètres, Harbour bridge est le plus large du monde : près de cinquante mètres.

Une attraction permet de grimper à son sommet et de découvrir, perché à 134 mètres au-dessus des eaux, une vue inoubliable sur la baie et la ville.
Du haut, on distingue l’autre emblème remarquable de Sydney : l’opéra.

Cet édifice est peut-être l’un des plus connus au monde, l’un de ces monuments capables de symboliser à lui-seul, dans l’imaginaire, une ville, comme la Tour Eiffel à Paris.

Inaugurée en 1973, cette salle de spectacle a été dessinée par le danois Jorn Ultzon et est applaudie aujourd’hui comme un des plus grands chefs-d’œuvre de l’architecture du XXe siècle. L’édifice, véritable sculpture urbaine, se dresse, spectaculaire, sur un promontoire, à Bennelong Point, dans le port, quasiment entouré par les eaux.

Il est soutenu par des centaines de piliers de béton qui s’enfoncent dans la baie. Son insolite forme futuriste intrigue par sa géométrie irrégulière et sa toiture couverte de milliers de tuiles de céramique blanche.
Certains voient dans cette succession de coques de béton un coquillage, d’autres un voilier. Libre à chacun de faire travailler son imagination !